La révolution des interfaces cerveau-machine accélère. En août 2025, Sam Altman, PDG d’OpenAI, a discrètement cofondé Merge Labs, une nouvelle société dont l’ambition est claire : concurrencer frontalement Neuralink, la startup d’interface neuronale dirigée par Elon Musk. Cette initiative ouvre un front stratégique inédit entre deux figures majeures de la tech, déjà opposées dans le domaine de l’intelligence artificielle.
Merge Labs : une vision étendue de la fusion homme-machine
Fondée avec Alex Blania, co-architecte de Worldcoin et pionnier de l’authentification biométrique via Tools for Humanity, Merge Labs bénéficie d’un socle technique hybride. L’entreprise prévoit de lever 850 millions de dollars, principalement auprès d’OpenAI Ventures, selon le rapport initial.
Contrairement à Neuralink, axée sur les protocoles médicaux pour patients paralysés, Merge Labs s’oriente vers un modèle plus vaste. Son objectif : développer des interfaces neuronales à haute bande passante capables d’intégrer directement les systèmes d’intelligence artificielle. L’idée maîtresse repose sur « The Merge », concept défendu par Altman en 2017, selon lequel les humains doivent fusionner avec les machines pour ne pas être dépassés par elles.
Merge entend créer des dispositifs implantables qui vont plus loin que le seul contrôle moteur. Il s’agit d’étendre les capacités cognitives humaines, de sécuriser cette interaction par des biométries avancées, et d’établir un paradigme d’interfaces neuronales orientées IA, sécurisées et grand public.
Neuralink en tête, mais pour combien de temps ?
Neuralink, fondée en 2016, s’est imposée comme le premier acteur grand public du secteur. En janvier 2024, l’entreprise a débuté ses essais humains sur des patients paralysés. Ces derniers ont pu utiliser des interfaces neuronales actives pour déplacer un curseur, jouer à des jeux vidéo ou manipuler des objets 3D dans des environnements virtuels.
La société a récemment levé 600 millions de dollars sur une valorisation de 9 milliards. Son plan technique prévoit une expansion des électrodes implantées, passant de quelques milliers à 25 000 canaux sensoriels d’ici 2028. L’architecture veut couvrir plus de zones du cortex moteur, auditif et émotionnel.
Mais cette course effrénée soulève de nouvelles problématiques, notamment en matière de sécurité des données cérébrales. Merge Labs espère se différencier justement sur ce terrain, en s’appuyant sur les technologies d’identification développées pour Worldcoin, basées sur le scan de l’iris et des empreintes biométriques comportementales.
Une rivalité technologique aux airs de guerre personnelle
La création de Merge Labs s’inscrit dans une tension de fond entre Sam Altman et Elon Musk. Ce dernier a quitté le conseil d’administration d’OpenAI en 2018, et a plusieurs fois exprimé publiquement ses doutes sur la trajectoire de l’entreprise. En retour, Altman semble déterminé à ne pas laisser à Musk le monopole d’une technologie aussi stratégique que l’implant cérébral assisté par IA.
Ce nouvel épisode ressuscite une rivalité autrefois focalisée sur l’intelligence artificielle, désormais transposée dans le corps humain. Les deux entrepreneurs défendent une vision similaire : éviter que l’humain ne soit dépassé par les machines, mais leurs approches techniques et éthiques divergent.
Alors que Musk parle de “la machine qui construira la machine”, Altman mise sur une coévolution homme-IA reposant sur une fusion sûre, mesurée et prévisible.
Un marché en mutation rapide
Autrefois réservé aux laboratoires académiques, le secteur des implants cérébraux attire désormais les capitaux privés. Avec plus de 1,45 milliard de dollars levés par Neuralink et Merge Labs rien qu’en 2025, l’interface cerveau-machine devient un territoire stratégique d’innovation industrielle.
Les perspectives s’élargissent : aide aux personnes handicapées, optimisation cognitive, interaction homme-machine en temps réel, et développement d’avatars numériques pensants. Cependant, ces avancées posent de sérieuses questions éthiques. Qui contrôlera les données cérébrales ? Les implants seront-ils accessibles à tous ou réservés à une élite technologique ? Et surtout, jusqu’où pouvons-nous – et devons-nous – fusionner l’humain avec la machine ?
Chronologie des étapes clés
- 2016 : Fondation de Neuralink
- Janvier 2024 : Début des tests humains de Neuralink
- Juin 2025 : Neuralink boucle une levée à 600 M$
- Août 2025 : Lancement discrétionnaire de Merge Labs par Sam Altman et Alex Blania
Vers une ère post-humaine ?
Avec Merge Labs, Sam Altman relance le débat sur la coévolution homme-technologie. Au cœur du projet se trouve la croyance que les humains doivent amplifier leur capacité neuronale en s’unissant à l’intelligence artificielle. Il ne s’agit plus seulement de restaurer le mouvement ou la parole, mais de redéfinir ce que signifie penser, ressentir ou créer.
La compétition avec Neuralink ne fait que commencer. Toutefois, la convergence rapide des technologies cérébrales et de l’IA pourrait transformer durablement le rapport que les humains entretiennent avec leur propre cerveau.
Le futur ne sera peut-être pas piloté par la pensée. Il sera fait par elle.