Amazon a franchi une nouvelle étape dans son expansion énergétique en sécurisant un approvisionnement de 1,92 gigawatt en électricité nucléaire provenant de la centrale nucléaire Susquehanna en Pennsylvanie. Un volume colossal destiné à soutenir la croissance rapide de ses services cloud AWS et de ses infrastructures d’intelligence artificielle, confirmant une tendance marquée chez les géants de la technologie à se tourner vers des sources d’énergie à faible émission de carbone pour répondre à leurs besoins énergétiques.
Un contrat stratégique avec Talen Energy
Le contrat signé avec Talen Energy, qui exploite la centrale nucléaire Susquehanna, court jusqu’en 2042. Cette centrale, située dans le nord-est de la Pennsylvanie, a la capacité d’alimenter plus de deux millions de foyers. Elle est directement connectée à un campus de data centers développé par Cumulus Data, filiale de Talen, que Amazon Web Services (AWS) a racheté en mars 2024 pour 650 millions de dollars.
Initialement, l’accord prévoyait une alimentation directe en énergie depuis la centrale vers les infrastructures d’AWS. Toutefois, en raison de contraintes réglementaires, le mécanisme a été revu pour acheminer l’électricité nucléaire via le réseau électrique américain. Cette transition permettra à Amazon de continuer à bénéficier d’une énergie décarbonée, tout en appuyant le maintien du réseau grâce aux frais d’utilisation versés.
Une course à la puissance entre géants du numérique
Amazon s’inscrit dans une tendance émergente chez les acteurs technologiques majeurs. Microsoft s’est déjà engagé avec Constellation Energy pour obtenir 835 MW d’énergie nucléaire. Meta a, lui, signé pour 1,1 GW avec le même fournisseur. Le recours croissant à l’énergie nucléaire s’explique par les besoins toujours plus importants des centres de données et des applications d’intelligence artificielle, dont la consommation électrique dépasse désormais celle de nombreuses infrastructures industrielles traditionnelles.
Dans une analogie énergétique contemporaine, les centrales nucléaires deviennent les barrages du XXIe siècle pour les grandes entreprises du numérique. Fiables, stables et bas carbone, elles représentent l’outil idéal pour alimenter une économie digitale en perpétuelle expansion.
Répondre aux impératifs de décarbonation
Amazon avait déjà atteint son objectif de fonctionner à 100 % sur des énergies renouvelables en 2024, soit six ans avant son échéance de 2030. En intégrant l’énergie nucléaire à son portefeuille énergétique, la firme poursuit sa trajectoire vers une infrastructure entièrement décarbonée. Ce choix est également motivé par la nature constante de l’approvisionnement nucléaire, qui assure une stabilité essentielle aux serveurs cloud et à l’IA, souvent sensibles aux fluctuations des énergies intermittentes.
La possibilité évoquée de développer à terme des petits réacteurs modulaires (SMR) sur le site renforce encore cette stratégie de diversification énergétique. Ces technologies avancées offrent une flexibilité accrue et s’intègrent plus facilement aux infrastructures existantes, en particulier pour les entreprises cherchant à rapprocher leur production d’énergie de leurs installations informatiques stratégiques.
Entre innovation et vigilance réglementaire
Si le mouvement vers le nucléaire est salué pour ses bénéfices climatiques, il soulève également des questions. Les implications environnementales, la gestion des déchets et les considérations de sécurité restent centrales dans le débat autour du développement nucléaire, même lorsque celui-ci repose sur des installations existantes. À cela s’ajoutent les incertitudes réglementaires qui accompagnent les contrats directs entre entreprises privées et opérateurs énergétiques, comme le montre l’ajustement opéré dans l’accord d’Amazon.
Pour autant, ces accords reflètent une volonté claire des acteurs du secteur technologique de prendre le contrôle de leur approvisionnement énergétique, à la fois pour stabiliser leurs opérations hyperscale et pour répondre à des exigences de durabilité de plus en plus strictes. En peu de temps, le nucléaire est devenu l’allié inattendu des géants du cloud.
Un virage énergétique que rien ne semble freiner
À mesure que la consommation énergétique des technologies basées sur l’IA continue de grimper, la course au nucléaire s’apparente à une ruée vers une ressource stratégique. Alors que l’économie de l’intelligence artificielle infléchit les priorités énergétiques mondiales, des partenariats comme celui entre Amazon et Talen Energy pourraient devenir la norme plutôt que l’exception.
Pour Amazon comme pour d’autres, l’avenir ne passe plus seulement par le cloud, mais par l’atome. Et dans cette dynamique, chaque mégawatt nucléaire devient une garantie de performance, de continuité et d’engagement environnemental.
